|
Dar HI - photo Jérôme Spriet |
matali crasset présentait mercredi dernier au cinéma Le Nouvel Odéon un documentaire sur la maison d'hôtes Dar-HI à Nefta en Tunisie. Réalisé et produit par David Haremza et Christophe Dumoulin, ce petit film retrace l'aventure humaine et architecturale menée par la designer et ses acolytes de la "HI Life", Patrick Elouarghi et Philippe Chapelet, pour faire sortir du sable en décembre dernier ce concept hôtelier d'un genre nouveau.
"HI Life", c'est tout un programme de vie et surtout d'hébergement que nous propose le trio à Nice (HI Hotel), Paris (HI Matic) et maintenant en Tunisie. Loin des standards hôteliers, chaque établissement est une invitation à briser la routine, à voyager différemment, mais aussi à dormir, manger, se rencontrer autrement.
matali crasset n'a pas attendu de réaliser des projets d'hôtellerie pour réfléchir à de nouvelles manières de vivre ensemble. C'est même le dénominateur commun de la plupart de ses projets, si l'on se penche sur sa prolifique production. matali ouvre, décloisonne, met en relation les espaces, les formes ou les gens pour recréer d'autres logiques de vie. Sur son site, les onglets "hospitalité", "générosité" ou "empathie" annoncent les préoccupations de la designer.
Celles-ci se retrouvent comme un fil rouge dans ce sympathique documentaire (pour le moment en attente de diffuseurs), qui ne se borne pas à faire la description d'un nouveau concept d'éco-tourisme. Il est le témoin de la persévérance et de l'intégrité d'une équipe pour s'implanter et faire construire un bâtiment éco conçu en Tunisie, dans une zone délaissée par les investisseurs et les touristes. Ce film pourrait tout autant être une étude de cas pour expliquer à des néophytes ce qu'est un projet de design, parce qu'on y retrouve tous les ingrédients de la complexité du métier : un client exigeant, un cahier des charges ambitieux, des moyens techniques et humains parfois limités, parfois providentiels ; et surtout le désir têtu du designer de mener ses idées aussi intactes que possible jusqu'au bout du projet.
Au delà de la conception écologique du lieu, cette maison d'hôtes innove par son offre radicale, à l'opposé de tous les plans marketing appliqués aux lieux de tourisme. À Dar HI, il n'y a rien à faire. Pas de télé à regarder, de monument à visiter, d'accrobranche à essayer. Il y a bien sûr le désert, qui agit comme un aimant sur ceux qui seront venus jusque dans ce coin reculé du monde pour le contempler. Mais il fait partie du dispositif de la retraite, c'est-à-dire de la spatialité et de la temporalité proposées ici pour se retirer du monde, se reposer, réfléchir, rêver. Loin des contingences de la vie quotidienne ou de la clameur de la ville, Dar HI suggère à ses occupants de prendre le temps de la contemplation, de laisser la magie du lieu opérer pour s'ouvrir à d'autres idées, à de nouvelles envies. La parenthèse enchantée a certes un coût conséquent, mais il est déjà plaisant de penser qu'elle existe quelque part, que d'autres personnes en rêvent aussi et se sont mis en tête de la bâtir et de la faire vivre.
Ce que nous souffle aussi ce documentaire, c'est que ce projet, réinscrit dans la production de matali crasset, semble être la matérialisation d'une montée en puissance de la designer. Alors que sa réputation n'est plus à faire, alors que cette touche-à-tout semble avoir revisité un si grand nombre d'objets et d'espaces, Dar HI pourrait être le signe d'un tournant dans son travail. La dimension architecturale bien sûr, et les problématiques qu'elle génère, lui ouvre d'autres champs d'action. Mais surtout la justesse formelle de la maison d'hôtes de Nefta est l'indice d'une parfaite maîtrise du projet, de son implantation et de ses enjeux, et ce à toutes les échelles. Gageons que matali saura poursuivre sa trajectoire comme elle sait le faire, en designer et en simplicité.
|
Dar HI - photo Jérôme Spriet |
|
Dar HI - photo Jérôme Spriet |
|
Dar HI - photo Jérôme Spriet |
|
Dar HI - photo Jérôme Spriet |
|
Dar HI - photo Jérôme Spriet |
|
Dar HI - photo Jérôme Spriet |
|
Dar HI - photo Jérôme Spriet |
|
Dar HI - photo Jérôme Spriet |
0 commentaires :
Enregistrer un commentaire